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27/03/2006
Morgon, le gammay noir à jus blanc s'exprime
Sous une noble robe de rubis aux reflets violacés, le Morgon Côte de Py de Dominique Piron est l'empreinte de son terroir signée en lettres de petits fruits noirs et rouges. Le gamay noir est franc et bien dompté.
L'attaque en bouche classique du Morgon est encore amplifiée chez ce bon cru. Le nez prépare à cette force fraiche de jeunes fruits rouges.
Exit les tanins ronds et fondus, la complexité des arômes du temps (le millésime n'est que de 2004). Le Gamay est un bon véhicule du terroir - au-delà même du fruit - ici, une colline éruptive unique de vieux granit et de basalte.
Le Morgon est ce qui se fait de mieux en Beaujolais. Il surclasse sans peine ses cousins vulgaires mais ne cache rien de son cépage enjoué. Le cru 2004 de Côté du Py est une déferlante de groseille et cassis, avec une belle acidité et une structure minérale surprenante. La finale est délicieusement mentholée.
L'élevage traditionnel et respectueux de la nature transpire dans ce vin minéral, fruité, légèrement épicé et qui devrait profiter de quelques mois de garde.
Je vous conseille donc de le laisser "morgonner" comme on dit et attendre avec envie les arômes de kirsch et les impressions subtiles de sous-bois.
Ma note personnelle : 6,5 en attendant 7 / 10 dans quelques mois...
Contact : www.domaines-piron.fr
07:35 Publié dans Les Beaujolais | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Gastronomie
20/03/2006
Les Boucherts Verts (De Gronne slagtere)
Nous sommes loin d'Hollywood, des manequins siliconnés, des voitures de sport et de l'hémoglobine vulgaire.
Anders-Thomas Jensen est danois. Il décrit deux seconds bouchers, n'ayant jamais quitté les arrières salles, souvent froides, de la boucherie de leur patron tyranique. Le tableau de ces vies médiocres et vassales semble figé comme les figures aux reflets de gelée de paté de tête de ces deux lambdas de la société moderne. Svend sue au travail, Bjarne rêve d'ailleurs, et ils se retrouvent pour leur barbecue dominical, pour manger... de la viande grillée. La ville est grise et leur banlieue maussade. Vies dignes d'un ciel danois.
Pourtant Svend est ambitieux, taraudé par la volonté de faire quelque chose de son existence, quelles qu'en soient les conséquences. Que pourrait-il vraiment perdre d'aillleurs ?
Les débuts sont catastrophiques jusqu'à ce que leur ancien chef leur lance un défit.
L'art cinématographique est finement manipulé. L'atmosphère et les couleurs vont de paire dans des tons verts grisatres, ternes. Les personnages sont comme tirés d'une bande déssinée. Ils expriment à la perfection leur caractère, défauts, faiblesses mesquines, en fait leur humanité, leur chaleur intérieure, parfois étourdie par leur volonté de changer le destin, souvent tout simplement bonne.
Svend a une chemise à manches courtes et à losanges gris, une cravatte grise trop courte au noeud insignifiant et un pantalon gris-bleu à soufflets sans ceinture. Son front lui mange le visage et son crane chauve à moitié semble le prolonger jusqu'à la perpendiculaire.
Les clients ont le teint vert de gris sous des chapeaux de vieilles ridicules de mauvais goût et des manteaux de vieux tristes comme leurs pensées.
La puissance du film au-delà de l'humour, de la prouesse de réalisation et d'acteurs, réside dans une morale qui manque souvent à nos générations : croire en soi, travailler et faire les choses avec passion. Svend est un fou de boucherie, Bjarne croit suffisamment en lui pour le suivre très loin, le succès n'a besoin d'aucun autre apparat.
Vivre avec passion, croire en soi, faire les choses avec un soucis d'exigence permanente... Film à voir, incontestablement.
08:45 Publié dans A voir, Zorreurs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Gastronomie
13/03/2006
Château Kefraya, grand vin du Liban
Vous recherchez l’exotisme des nouveaux pays du vin, la nouvelle star des sondages anglo-saxons du vin mondial, du vin global, la simplicité marketing du mono cépage, type jus de raisin alcoolisé et lourdement boisé ?
Alors changez de destination et rangez votre verre !
Le Château Kefraya n’est pas un "vin du monde", facile ou grossièrement flatteur. Les cépages français les plus fins et racés sont élevés dans une plaine plus connue pour la souffrance des hommes que pour ses vagues de touristes avides de nouveauté. A 1 000 mètres d’altitude, le sud de la plaine de la Bekaa offre un support argilo calcaire et caillouteux, et un ensoleillement de rêve –jusqu’à sept mois sans précipitation- aux grands cépages français de Cabernet-Sauvignon, Mouvèdre (quel bonheur de le voir cultivé au Liban !), Syrah, Carignan, Cinsault et Grenache.
Le Château Kefraya sélectionne sur 300 ha surtout le Cabernet-Sauvignon, le Mouvèdre, le Carignan, le Cinsault et peu de Grenache. Les raisins sont vendangés manuellement puis pressés et mis en cuve par cépage. Le vieillissement de 18 mois commence après le coupage pour moitié en cuves inox et en fûts de chêne français. La mise en bouteille intervient au bout de 20 mois après les vendanges et amorce une mise en cave d’un an au château.
Le cru de 1999 que j’ai dégusté est tout simplement magnifique. Le flairage est finement épicé, noble sur des tons de cuir et de fruits noirs bien mûrs. La mise en bouche est somptueuse et rare car harmonieuse et étonnament tonique. Une belle acidité et une finale mentholée soutiennent cette vigueur sans altérer le plaisir et la maturité parfaite de ce grand vin. Les mûres, le cassis et la réglisse se bousculent avec respect sur vos papilles. Fermez les yeux et appréciez ces arômes amples et racés.
Ma note : 8/10 pour ce beau travail libanais !
Récompenses :
2003: Médaille d'Argent Concours International de Mundus Vini – Allemagne
2003: Médaille de Bronze Concours Œnologique International - Vinitaly
2002: Médaille de Bronze International Competition of Wine and Spirits (Londres)
08:25 Publié dans Liban | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Cabernet Sauvignon, Mourvèdre, Carignan, Cinsault, Grenache
06/03/2006
Vin jaune, côtes du Jura, cépage savagnin
Le Jura est un pays rude qui ne faillit pas à la tradition de se mériter. L'excellence prend le temps de s'affiner. 6 ans et 3 mois exactement !
C'est la clef de décriptage des 62 cl qui composent ce précieux patrimoine viticole jurassien. En effet, 62% du vin seulement persiste à l'évaporation au travers des tonneaux de bois et rejoindra enfin les "clavelins", ces bouteilles là aussi uniques, courtes en hauteur, au col large et à la couleur jaune doré.
Mais avant cette fin commerciale, il faut prendre le temps organique, celui de l'élevage vivant d'un vin parfaitement incomparable, un "never seen before", trop "spécial" pour les goûts asceptisés modernes, mais forcément troublant. Cette expérience unique, vous la devrez à des levures anaérobie, les "sacchromyces oviformis", qui au terme d'une fermentation lente et totale viennent se développer à la surface des cuves pour oxyder doucement le vin. Cette technique propre au Jura et à son climat apporte au vin un parfum et un goût très affirmés, très sec, vieillis, de noix et amandes encore vertes et croquantes, d'épices. L'acidité est importante et donne à ce vin une vigueur incroyable.
Le vin jaune, on aime ou pas, mais on n'y reste jamais indifférent. Sa robe "vieil or" est limpide et annonce sa pureté. Le flairage est incroyable et vous sèche les narines au sens propre comme au figuré. Très spécial, dans les tons de noix, de bois, très pur et comme sorti d'un désert avec ses seules qualités intrinsèques portées par une teneur alcoolique forte et parfaitement intégrée aux arômes. Mais non, il ne s'agit pas d'une eau de vie, 14° "seulement".
La bouche pour une fois avec un tel nez est complètement à la hauteur et confirme. Le vin jaune est relativement rond sans être moelleux, boisé, sur les tons de noix et de fruits secs. La tenue en bouche est très surprenante.
La dégustation est conseillée à 16° en apéritif, sur des plats exotiques, de la viande blanche ou du poisson en crème et sur le fromage.
Potentiel de garde : 100 ans ! Vive le Jura pour ce joyau, vive la France pour son éclectisme !
Contact : http://www.jura-vins.com/
08:00 Publié dans Les Jura | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Gastronomie